antiAtlas Journal #5, 2022
LES EXPULSIONS PAR VOIE AÉRIENNE ET LA COLONIE DE PEUPLEMENT
Angela Smith
Résumé: Les compagnies aériennes jouent un rôle important dans la gestion des frontières et dans les expulsions, non seulement sur le plan de l'infrastructure aérienne mais aussi en tant que symboles nationaux puissants et sensibles qui façonnent les contours de l'appartenance. Dans le contexte de l'Australie, l’expulsion fonctionne comme un acte d'affirmation de la souveraineté de l'État colonisateur au sein des circulations carcérales plus larges de l'archipel du Pacifique.
Angela Smith est doctorante à l'Université de New South Wales, Sydney, où elle étudie l'aviation et la puissance aérienne dans les pratiques d'expulsion et de maintien de l'ordre aux abords de la Méditerranée. Elle s'intéresse à la géographie politique, aux migrations, au passé de l'Empire et à l'histoire contemporaine, ainsi qu'aux politiques néolibérales en matière de sécurité.
Mots-clés: expulsion, compagnies aérienne, colonialisme de peuplement, visualité, rétention, Australie, Pacifique, appartenance
antiAtlas Journal #5 "Expulsions par voie aérienne"
Dirigé par William Walters, Clara Lecadet et Cédric Parizot
Désign Thierry Fournier
Secrétariat de rédaction Maxime Maréchal
antiAtlas Journal
Directeur de la publication Jean Cristofol
Directeur de rédaction Cédric Parizot
Directeur artistique Thierry Fournier
Comité de rédaction Jean Cristofol, Thierry Fournier, Anna Guilló, Cédric Parizot, Manoël Penicaud
Manifestation contre les « Expulsions vers le Danger » devant le siège de Qantas. Photo : Zebedee Parkes
Pour citer cette article: Smith, Angela, Les expulsions par voie aérienne et la colonie de peuplement, publié le 1er juin 2022, antiAtlas #5 | 2022, en ligne, URL www.antiatlas-journal.net/05-les-expulsions par voie aérienne et la colonie de peuplement, dernière consultation le Date
I. Dépossession et appartenance
1 Au cours des dernières décennies, l'Australie a de plus en plus eu recours à l'expulsion face aux demandeur·ses d'asile débouté·es et aux non-citoyen·nes qui ont enfreint le droit de l'immigration ou le droit pénal, conformément à la tendance mondiale qui consiste à mêler sanctions pénales et gestion des frontières (Grewcock, 2017a ; Weber, 2017 ; Weber et Powell, 2020). L'expulsion et sa relation avec les notions de criminalité, de moralité et de citoyenneté ont fait l'objet de débat en Australie depuis les premiers jours de la colonie de peuplement, fondée comme une nouvelle destination pour les indésirables de la Grande-Bretagne après que le transport des bagnard·es britanniques vers les colonies américaines eut cessé. Au cours des siècles qui ont suivi l'invasion britannique, la société des colons blancs a veillé à ce que la race, l'identité nationale et la citoyenneté soient des catégories étroitement protégées par le biais de politiques migratoires successives, notamment la tristement célèbre politique de l'Australie blanche. Dans les années 1990, la notion de « mauvaise moralité » est apparue comme un dispositif prévu par l'article 501 de la loi sur les migrations de 1958, permettant l'expulsion de non-citoyen·nes ayant fait l'objet de condamnations pénales, dont beaucoup avaient vécu en Australie pendant la majeure partie de leur vie (Grewcock, 2017a:123). L'expulsion transforme effectivement les sujets légaux en « étrangers criminels ne pouvant prétendre à la légitimité au sein de la société civile », faisant des membres établis de la communauté des étranger·es (Grewcock, 2017a:124). Bien que cela soit une fonction de l'expulsion dans de nombreux contextes, les mobilités forcées sont, pour l'Australie en tant que colonie de peuplement dans la région Asie-Pacifique, intrinsèquement liées aux questions d'appartenance, de possession et de souveraineté.
Les mobilités forcées sont intrinsèquement liées aux questions d'appartenance, de possession et de souveraineté.
Alors que les États d'Europe et d'Amérique du Nord, ainsi que le Royaume-Uni et l'Australie, ont gouverné par l'exclusion en expulsant les non-citoyen·nes (Kanstroom, 2007), les populations se sont mises à contester l'expulsion dans ses différents lieux d'exécution. Suite à des campagnes similaires à l'étranger, le plaidoyer et le débat public qui ont eu lieu ces dernières années en Australie ont mis en évidence le rôle des compagnies aériennes dans la mise en œuvre des expulsions. En tant qu'île éloignée, l'Australie est entièrement dépendante des infrastructures aériennes pour mener à bien les expulsions. Les débats publics sur la détention et l'expulsion, sur la géographie du régime frontalier de l'Australie, et sur le rôle des compagnies aériennes dans la mobilité forcée ont mis au premier plan la question de savoir qui est chez soi dans la colonie de peuplement. Ces questions et ces luttes se reflètent non seulement dans le langage visuel des manifestations et des campagnes, mais aussi dans le marketing et l'image de marque des compagnies aériennes.
Les problèmes de l'appartenance et de l'expulsion ont été explicitement débattus lors d'une récente affaire judiciaire très médiatisée relative à la décision d'expulser deux hommes aborigènes. La question de savoir si les Aborigènes peuvent être expulsé·es a été portée devant la Haute Cour australienne lorsqu'un homme Kamilaroi, né en Papouasie-Nouvelle-Guinée, et un homme Gunggari, né en Aotearoa-Nouvelle-Zélande, ont été expulsés pour des raisons de moralité après avoir été condamnés pour des infractions pénales. Les deux hommes vivaient en Australie depuis l'âge de six ans et, bien qu'aucun d'entre eux ne soit titulaire d'un passeport australien, ils ont chacun un parent aborigène et les deux hommes ont le statut de résident permanent australien. L'un des deux hommes a passé 500 jours en rétention, avant d'être libéré après que la Haute Cour eut statué que les Aborigènes ne pouvaient pas être expulsé·es d'Australie.
Dans un jugement serré rendu à quatre contre trois, la Haute Cour de Justice a statué en février 2020 que les Aborigènes qui satisfont au test tripartite de l'ascendance biologique, de l'auto-identification, et de la reconnaissance de l'indigénéité par un groupe traditionnel, ne peuvent être considéré·es comme étranger·es, ce qui leur confère un statut spécial dans le droit constitutionnel australien (Karp, 2020a). L'affaire s'est articulée autour des questions d'allégeance et de souveraineté. Les juges ont avancé un ensemble de propositions présentant une logique juridique. L'une de ces propositions stipule que, selon la common law, un·e étranger·e est une personne qui n'a pas de relation réciproque de protection permanente et d'allégeance permanente envers la Couronne (Love and Thoms vs Commonwealth of Australia, 2020). Le Commonwealth a fait valoir que si le lien des personnes des Premières Nations avec la terre est important, il n'équivaut pas à une allégeance à l'Australie. Les avocat·es défendant les deux hommes ont fait valoir que les personnes des Premières Nations ont une relation à la terre et aux eaux de l'Australie analogue à la notion d'allégeance qui est au fondement de la citoyenneté et que, par conséquent, la question de savoir « qui est ici à chez et qui est l'un·e des nôtres » est réglée (Karp and Davidson, 2019).
Les juges ont en outre proposé que la reconnaissance par la common law d'un titre coutumier autochtone « implique logiquement la reconnaissance des lois et coutumes d'une société aborigène, et en particulier, l'autorité de cette société à déterminer ses propres membres » (Love and Thoms vs Commonwealth of Australia, 2020). En d'autres termes, la majorité des juges décidèrent qu'il n'appartenait pas au parlement d'alors de déterminer qui est constitutionnellement « étranger·e », mais que les questions d'appartenance relèvent des communautés Aboriginal.
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2 Le gouvernement a fait valoir que les propositions formulées par les juges créeraient une catégorie de personnes qui échappent à la fois à la loi sur la citoyenneté (Citizenship Act) et à la loi sur les migrations (Migration Act) - une personne qui n'est ni un·e citoyen·e, ni un·e étranger·e. Les avocat·e s des hommes, dépassant ce conflit binaire, ont fait valoir qu'il était possible de créer une nouvelle catégorie d'appartenance : le ou la non-citoyen·ne non-étranger·e. Le Law Council of Australia, le plus haut corps d'avocat·es du pays, a salué la décision de la cour, qui a confirmé que « la question de l'appartenance aux sociétés aborigènes ne relève pas du pouvoir législatif du parlement australien » (McGuirk, 2020). Bien que cette affaire ait été considérée comme un cas de jurisprudence et une défaite majeure pour la puissance d'expulsion de l'État colonial, le fait qu'elle ait été portée devant la Haute Cour révèle quelque chose de la logique de possession et de déplacement inhérente à l'expulsion comme pratique de gouvernance coloniale.
L'expulsion comme pratique de gouvernance coloniale
Sur un territoire où la souveraineté n'a jamais été cédée, les tentatives d'expulsion de personnes des Premières Nations ont un effet démultiplié en termes d'accaparement et de désaveu par l'État colonial. Bien que la Haute Cour ait parlé du lien « métaphysique » entre les personnes des Premières Nations et la terre, la décision a été prise en fin de compte par le biais de la souveraineté de l'État colonial, en invoquant la protection de et l'allégeance à la Couronne. La prérogative de déterminer qui est chez soi et qui peut être expulsé·e est fondamentale pour l'État colonisateur et constitue un acte de possession qui est inextricablement lié à la dépossession des Aborigènes (Moreton-Robinson, 2015). La déportation et l'expulsion figurent de longue date parmi les processus de construction de la nation, et demeurent un moyen de continuellement réinstaurer l'État (Collyer, 2012:277). Dans le contexte de la colonie de peuplement tentant d'expulser les personnes des Premières Nations, il y a une triple spoliation à l'œuvre dans les tentatives de déposséder les gens de leur nation, de leur pouvoir de décision souveraine sur qui est bienvenu·e sur le territoire, et enfin dans les tentatives de faire disparaitre physiquement les gens du continent, comme cela s'est produit dans l'affaire "Love and Thoms".
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3 Le régime frontalier de l'Australie, y compris son réseau extracôtier de sites de détention, doit être compris comme « rendu fondamentalement possible par l'usurpation continue de la souveraineté aborigène sur leurs propres nations » (Pugliese, 2015:89). Un certain nombre d'universitaires, d'artistes et de militant·es des Premières Nations – tels que l'historien Tony Birch, les artistes Richard Bell et Vernon Ah Kee, ainsi que le militant et leader communautaire Uncle Ray Jackson – ont souligné le lien entre la violence à la frontière et la violation constante de la souveraineté des Premières Nations. Le pouvoir de décider qui accueillir, qui rejeter et qui expulser est une revendication de possession, comme l'écrit l'universitaire Amangu Yamatji Crystal McKinno : « La souveraineté coloniale repose sur le confinement violent à la fois des personnes Indigènes et des humains à la recherche d'un refuge dans le but de revendiquer et d'exercer activement sa propre autorité souveraine sur la colonie... Cependant, la souveraineté autochtone perdure malgré le colonialisme de peuplement » (McKinnon, 2020:693). Ce n'est qu'à travers la dépossession, la désubjectivation et le zonage (en missions, réserves, institutions d'aide sociale, etc.) des personnes aborigènes que l'État colonial pouvait marquer sa souveraineté territoriale, nommer ses autres extérieurs et tâcher de les contrôler par le biais de politiques d'immigration (Pugliese, 2015:90). Les activistes aborigènes ont cherché à contester le mandat de l'État colonial d'élargir ou de refuser l'accueil en délivrant des passeports aborigènes aux demandeur·ses d'asile et aux réfugié·es. Le leader Wiradjuri et militant pour la justice sociale Uncle Ray Jackson a délivré des passeports à un certain nombre de personnes en 2012, et en 2019, 400 passeports autorisés par les aîné·es aborigènes ont été délivrés et envoyés aux détenu·es d'un centre de rétention extracôtier australien sur l'île de Manus, en Papouasie-Nouvelle-Guinée. Pugliese a suggéré que la réinterprétation du passeport en tant que « technologie aborigène » marque à la fois la souveraineté non cédée des Aborigènes et leur droit d'offrir l'accueil et l'hospitalité sur leurs propres terres (Pugliese, 2015:86).
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Des passeports aborigènes ont été délivrés aux réfugié·es et aux demandeur·ses d'asile, dont 400 ont été envoyés aux détenu·es de l'île Manus. Illustration : ABC.
4 L'éminent artiste Vernon Ah Kee (des peuples Kuku Yalandji, Waanji, Yidindji, Koko Berrin et Gugu Yimithirr), discernant les modèles de détention, de confinement et de déplacement, a commencé à produire des œuvres d'art faisant le lien entre les expériences des Premières Nations et celles des demandeur·es d'asile. Sa famille faisait partie des milliers de personnes des Premières Nations qui ont été enlevé·es de force du continent et réinstallé·es sur Palm Island. Palm Island servait également d'établissement pénitentiaire pour les personnes des Premières Nations, et un nombre considérable d'hommes qui avaient déjà purgé leur peine y étaient encore renvoyés. Cette double peine trouve un écho aujourd'hui dans les annulations de visa et les expulsions de personnes ayant déjà purgé leur peine pour des crimes commis. Une œuvre vidéo à trois canaux réalisée en 2018 par Ah Kee montre un couple d'Afghans venant demander l'asile en Australie par bateau, superposé à des vues aériennes de Palm Island. Dans les notes de l'exposition, Ah Kee écrit : « Je ne peux pas me défaire de l'idée que Palm Island est le prototype des îles Nauru, Manus ou Christmas. » (NSW Museums & Galleries, 2020).
Continuités entre les formes historiques et contemporaines de dépossession et de déplacement
Il existe un certain nombre de continuités manifestes reliant les formes historiques et contemporaines de dépossession et de déplacement : les technologies de déplacement forcé et de confinement ; l'utilisation de territoires éloignés tels que des îles ; la logique raciale sous-jacente qui consiste à déterminer quelles populations nécessitent une gestion et une intervention, et quelle occupation de la terre doit être naturalisée comme étant de droit. Il y a aussi un certain nombre de choses qui sont propres aux expulsions contemporaines par voie aérienne et se distinguent d'autres formes de dépossession. Les expulsions contemporaines touchent l'individu ou la famille et sont justifiées en fonction du cas particulier de la personne - demande de statut de réfugié ou antécédents criminels selon le cas, malgré l'écrasante évidence de l'existence de logiques raciales à l'œuvre dans la prise de décision. Les expulsions reposent également sur la volonté d'un autre État - le "foyer" réel ou supposé de la personne déportée - de recevoir cette personne (même si l'État d'accueil est contraint ou forcé par des incitations financières). L’expulsion est donc à la fois l'acte d'expulser quelqu'un et la relocalisation de cette personne ailleurs (Walters, 2016:441). Cet « ailleurs » est fondamental pour légitimer l'expulsion des expulsé·es, quelle que soit la relation entre l'individu et le lieu vers lequel il est expulsé, qui peut être étranger ou dangereux. Chelsea Watego soutient que si l'imaginaire colonial peut insister sur le fait que les Autochtones existent dans un « lointain, très lointain pays, à une époque lointaine », un endroit qu'elle décrit comme un « lieu de dépossession », elle nous rappelle que la souveraineté Indigène est affirmée dans chaque revendication du « toujours ici » et dans chaque aveu de « souveraineté jamais cédée » (Watego, 2021:49).
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II. Archipel de la détention et de la mobilité forcée
6L'écrivain kurde Behrouz Boochani, qui a été détenu par l'Australie sur l'île de Manus pendant six ans, a plaidé pour que ces installations soient nommées pour ce qu'elles sont : des prisons (Boochani, 2019). Dans sa « Théorie de la prison de Manus», un projet philosophique et créatif développé avec son collaborateur Omid Tofighian, Behrouz se focalise sur les connaissances et les perceptions des demandeur·ses d'asile détenu·es pour analyser la prison de Manus non seulement comme un site, mais aussi comme une idéologie et un ensemble de cultures institutionnelles (Tofighian, 2020:1144). Au cœur de la théorie de la prison de Manus se trouve la notion de « système kyriarcal » - une série de "structures qui se croisent et se renforcent mutuellement, axées sur la domination, la répression et la soumission" (Tofighian, 2020:1142). Pour Behrouz, la violence frontalière australienne est liée à l'imaginaire colonial de l'Australie. Behrouz considère que les deux îles - Manus et l'Australie - sont profondément intriquées l'une à l'autre : L'Australie était une colonie pénitentiaire et utilise Manus comme centre de détention insulaire, l'Australie a colonisé la Papouasie-Nouvelle-Guinée, et la Papouasie-Nouvelle-Guinée a colonisé l'île de Manus (Paik, 2021). La théorie de la prison de Manus considère la détention extracôtière non comme quelque chose de périphérique ou de distant, mais comme un produit, situé au cœur de la nation, des histoires coloniales modernes et des réseaux idéologiques (Tofighian, 2020:1148). Les circulations et l'entrave des détenu·es au sein des réseaux de détention du Pacifique s'appuient donc non seulement sur des infrastructures physiques, mais aussi sur des architectures de connaissance, d'imagination et de gouvernance.
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Sites utilisés pour la détention et le traitement extracôtiers de l'Australie au cours des deux dernières décennies. Image créée dans Google Maps
III. La pandémie et l'île Christmas
7 Pendant la pandémie de COVID, les expulsions depuis l'Australie ont été suspendues, car, dès le début, le pays a fermé ses frontières internationales (en mars 2020). Avant le COVID, les chiffres du gouvernement de février 2020 suggéraient qu'il y avait près de 50 000 personnes dont les demandes d'asile avaient été rejetées et qui étaient en attente d'expulsion (Stayner, 2020). Ces demandeur·ses d'asile étaient tou·tes arrivé·es par avion. En outre, le gouvernement annule de plus en plus de visas pour motif de moralité, généralement en raison d'une condamnation pénale. Les modifications apportées à la section 501 de la loi australienne sur les migrations fin 2014 ont abaissé le seuil d'expulsion criminelle et supprimé l'interdiction d'expulser les résident·es de longue durée.
Ces changements ont considérablement renforcé la capacité d'expulsion du gouvernement australien.
Les pouvoirs ministériels ont été élargis pour permettre au ministre d'annuler les visas en cours pour motifs de moralité, introduisant l'annulation obligatoire des visas dans les cas où le ou la titulaire du visa avait été condamné·e à une peine de prison de 12 mois ou plus. Depuis ces changements en 2014, le nombre d'annulations de visa pour des raisons de moralité a augmenté de plus de 1 240 % à la fin de 2020 (Department of Home Affairs, 2021). Les politicien·nes ont célébré ce nouveau régime comme une mesure de prévention de la criminalité (Billings, 2019). Ces changements ont considérablement renforcé la capacité du gouvernement australien de renvoyer des personnes qui vivent en Australie depuis de nombreuses années et qui ont des liens sociaux et communautaires développés (Grewcock, 2017b). Les décisions concernant les annulations de visa ne tiennent pas compte des circonstances personnelles, de la gravité des infractions commises, ni de la durée de résidence en Australie (Weber et Powell, 2020). Environ 6 300 personnes ont vu leur visa annulé pour des raisons de moralité depuis l'introduction de ces changements (McGowan, 2021). Le motif le plus courant des annulations de visa pour des raisons de moralité est relatif aux infractions liées à la drogue (McHardy, 2021b).
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8Pour les personnes ayant purgé une peine de prison et dont le visa a été annulé, le gouvernement australien gère un système de renvoi " Prison to Plane ", désigné comme P2P (Department of Home Affairs, 2018). Il est clair que, dans la conceptualisation du gouvernement, il existe un corridor direct qui permet de transférer rapidement les expulsé·es d'un site carcéral à un autre : de la prison à l'avion. Il existe deux types d'éloignements P2P : soit une personne est éloignée directement de la prison vers un avion sans être physiquement placée en centre de rétention ; soit la personne est libérée de prison et son départ est retardé, auquel cas elle est enfermée jusqu'à 72 heures dans un centre de rétention pour être mise à bord d'un avion.
D'un site carcéral à un autre : de la prison à l'avion.
Avec la fermeture des frontières internationales de l'Australie en mars 2020, les centres de rétention sur le continent se sont retrouvés encombrés de personnes dont les visas ont été annulés. Le gouvernement a profité de l'occasion pour rouvrir le centre de North West Point sur l'île Christmas en août 2020 afin d'héberger les personnes dont le visa avait été annulé pour des raisons de moralité, dans l'attente de leur expulsion. Le corridor reliant la prison à l'avion d'expulsion étant bloqué, le gouvernement a mis les détenu·es dans des avions à destination de la lointaine île Christmas à la place. D'août 2020 à mai 2021, environ 250 personnes expulsées ont été transférées dans l'installation. Le corridor d'expulsion s'étend donc sur plus de 1 500 kilomètres entre l'Australie continentale et un territoire éloigné, tout en restant sous la juridiction de l'Australie. Le gouvernement a défendu la réouverture de l'installation à un coût de 55,6 millions de dollars australiens.
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Le centre de détention pour immigrants situé à North West Point sur l'île Christmas. Photo : DIAC images.
IV. « Pour cause de moralité »
9 L'annulation du visa pour cause de moralité a une fonction punitive, qui présume que les personnes sont en dehors du contrat social en raison de leur délinquance et de leur statut de non-citoyen·ne, l'incarcération et l'expulsion étant utilisées pour renforcer les limites de l'appartenance à la politie australienne (Weber et Powell, 2020:247). Les changements apportés à la loi sur les migrations ont affecté de manière disproportionnée les Néo-Zélandais·es, dont beaucoup sont des résident·es permanent·es et de longue durée en Australie, constituant le plus grand groupe de nationalité à voir son visa annulé en vertu de la S501. Entre janvier 2015 et mars 2020, plus de 2 000 Néo-Zélandais·es ont été expulsé·es d'Australie, la majorité (60 %) étant des Māori ou des Pasifika. Les personnes expulsées vers Aotearoa Nouvelle-Zélande ne sont donc pas seulement un groupe racialisé et criminalisé, mais aussi un groupe composé principalement de personnes des Premières Nations, expulsées au sein de l'archipel carcéral du Pacifique. Le gouvernement australien n'a pas fait preuve d'une grande clémence envers les personnes vulnérables : parmi les Néo-Zélandais·es expulsé·es figurent une femme de 70 ans qui vivait en Australie depuis 55 ans (Dunn, 2021), un homme tétraplégique qui résidait en Australie depuis 36 ans (Milman, 2015) et un enfant de 15 ans qui a été expulsé seul (McGowan, 2021).
Le régime juridique et migratoire de l'Australie impose une triple peine aux non-ressortissant·es.
Si le régime juridique et migratoire de l'Australie impose une triple peine aux non-ressortissant·es sous la forme d'une incarcération, d'une rétention et d'une expulsion, les personnes expulsées sont confrontées à un paramètre supplémentaire en Aotearoa Nouvelle-Zélande sous la forme d'un suivi et d'une surveillance permanents. En novembre 2015, quelques jours seulement avant l'atterrissage d'un avion de déporté·es, le parlement a adopté à la hâte une loi établissant un nouveau régime de surveillance pour les soi-disant « délinquant·es de retour» (McHardy, 2021b:2). Des conditions spéciales sont systématiquement appliquées à ce groupe (telles que la surveillance électronique et le couvre-feu), les soumettant à un niveau plus élevé de restriction et de surveillance continue, ainsi qu'à un niveau de protection juridique plus faible que les personnes libérées des prisons d'Aotearoa Nouvelle Zélande (McHardy, 2021a). Ce faisant, l'État a adopté la même logique de profilage des risques et de gestion préventive que celle déployée par l'État australien, « important la logique du risque du régime frontalier australien dans son propre projet de sécurisation » (McHardy, 2021a).
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10 Les chercheur·ses ont mis en garde contre une compréhension de l'expulsion en tant qu'"événement", mais l'ont plutôt considérée comme un processus se déployant dans l'espace et dans le temps, depuis la condition de déportabilité jusqu’àux aux jours-mois-années d'éloignement et de marginalisation subéquents. Dans la loi néo-zélandaise de 2015 Returning Offenders (Management and Information) Act (loi ROMI), nous voyons la formalisation et l'encodage juridique de la punition prolongée des expulsé·es. La loi ROMI fixe des conditions sur le lieu de vie et de travail d'un·e rapatrié·e, et même sur les personnes qu'il ou qu'elle peut ou ne peut pas fréquenter (McNeill, 2021). Cette logique de sécurisation a continué à faire écho dans le Pacifique, les Samoa proposant une mesure similaire dans le projet de loi samoan de 2019 sur les délinquant·es de retour (Returning Offenders Bill) (Ah Tong, 2019). Selon ce projet de loi, tous les « délinquant·es de retour » seraient tenu·es de se présenter à un agent de probation, auraient besoin d'une autorisation pour changer de logement, et seraient soumis·es à des restrictions similaires concernant les personnes avec lesquelles ils et elles seraient autorisé·es à vivre, à travailler et à avoir des relations sociales. Alors qu'en Australie, les délinquant·es font l'objet d'un traitement différencié sur la base de leur statut d'« étranger·e », lorsqu'elles et ils sont expulsé·es vers un autre pays du Pacifique, les personnes sont à nouveau traitées de manière différenciée sur la base de leur extériorité et de "l'étrangéité" de leur délit. Dans le cadre des conversations très médiatisées et tendues sur les expulsions d'Australie, la première ministre néo-zélandaise Jacinda Ardern a déclaré : « Renvoyez les Kiwis, les vrais Kiwis - n'expulsez pas votre peuple et vos problèmes » (Moir, 2020), soulignant à la fois l'australianité (Australianness) de ces expulsé·es et soulevant la question de ce qui fait un·e « vrai·e » Néo-Zélandais·e.
Il y a un élément profondément affectif et relationnel dans cette punition
Les restrictions légales inscrites dans ces projets de loi sur les délinquant·es de retour ne font qu'aggraver les défis auxquels les rapatrié·es sont déjà confronté·es lorsqu'ils et elles tentent de se construire une vie dans un pays où ils et elles peuvent ne détenir que très peu de ressources sociales ou économiques, où elles et ils ont besoin d'un emploi, d'un logement et de soins, et où elles et ils ne parlent peut-être pas la langue ou ne sont pas familier·es avec les systèmes et les structures sociales. Alors que le système australien de justice pénale et d'expulsion est responsable de la disparité raciale des personnes expulsées vers Aotearoa Nouvelle-Zélande, l'État néo-zélandais continue de traiter ce groupe comme un risque à contenir (McHardy, 2021a). Les expulsions sont effectuées sans tenir compte de la séparation des familles, les Néo-Zélandais·es laissant derrière eux en Australie des enfants auxquels ils et elles ne pourront plus jamais rendre visite. Il y a un élément profondément affectif et relationnel dans cette punition, qui a également été utilisée contre les Aborigènes et les indigènes du détroit de Torres (Torres Strait Islanders).
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11 Les pouvoirs d'expulsion du ministre de l'Intérieur et de son ministère pourraient être encore étendus grâce à un nouvel amendement du dispositif législatif - le projet de loi de 2021 portant amendement de la loi sur les migrations (renforçant le test de moralité) de 2021 (Migration Amendment (Strengthening the Character Test) Bill 2021). L'un des principaux changements introduits par ce projet de loi, s'il est adopté, est que le seuil de condamnation pour une infraction désignée se fonde sur la peine maximale applicable, plutôt que sur la peine effectivement prononcée. Si une infraction pertinente est assortie d'une peine maximale d'au moins deux ans d'emprisonnement, toute personne condamnée pour cette infraction échouera automatiquement au test de moralité, quelle que soit sa peine réelle. En d'autres termes, si un juge peut être en mesure d'entendre des preuves et de considérer le contexte général de l'infraction et la situation du délinquant·e afin de déterminer une peine, tout cela sera négligé. En ignorant ces évaluations contextuelles propres à chaque cas, le gouvernement cherche à combattre le pouvoir discrétionnaire des juges qui, en tenant compte du risque d'expulsion, condamnaient certaines personnes en dessous du seuil pour éviter les annulations de visa (Commonwealth of Australia, 2017). Ce projet de loi élargirait encore le pouvoir du ministre de passer outre les issues judiciaires et de fonder les décisions d'annulation de visa sur quelque chose d'entièrement spéculatif et fictionnel – une peine qui aurait pu être prononcée, mais qui ne l'a pas été.
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V. Cruauté et spectacle
Légende : Des panneaux d'affichage mobiles ont fait le tour des capitales en 2018 pour dénoncer le rôle de Qantas dans les expulsions.
12 Avant l'arrivée sur l'île Christmas des détenu·es dont les visas ont été annulés, les seules personnes détenues sur l'île à cette époque étaient une famille tamoule de quatre personnes emmenée de la ville de Biloela, dans le Queensland, en pays Gangulu. Les demandeur·ses d'asile ont été éloigné·es de la ville régionale après le rejet de leur demande d'asile, et ont d'abord été retenu·es à Melbourne avant d'être envoyé·es sur l'île Christmas en août 2019, après qu'un théâtral ordre par téléphone en plein vol a empêché, au dernier moment, qu'ils et elles soient expulsé·es vers le Sri Lanka, et que leur avion a été contraint d'atterrir à Darwin. Le ministère de l'Intérieur a confirmé que le coût de la détention de la famille sur l'île Christmas pendant les quatorze premiers mois s'élevait à 3,9 millions de dollars australiens. Si l'on ajoute à cela la facture de leur détention à Melbourne et les frais de justice engagés par le gouvernement fédéral en 2021, le gouvernement avait dépensé plus de 6 millions de dollars australiens pour la détention d'une famille composée de deux adultes et de deux jeunes enfants nées en Australie (Taylor, 2021). À l'ère de la prétendue efficacité néolibérale et des rationalisations du marché, comment comprendre une dépense aussi excessive, arbitraire et grossièrement gaspillée, sinon comme la mobilisation de la cruauté et du spectacle ? A l'heure où l'Australie a abandonné le soutien économique aux migrant·es temporaires pendant la crise du COVID (Berg et Farbenblum, 2020), à quelles autres fins ces dépenses carcérales auraient-elles pu être affectées ? Toute la force pénale de l'État a été exercée contre cette famille, qui bénéficie du fort soutien de sa communauté régionale du Queensland. Cette dernière a mené une campagne bruyante pour convaincre le gouvernement et le grand public de l'appartenance de la famille à la communauté. Bien qu'il s'agisse d'un cas quelque peu exceptionnel, en termes de niveau d'investissement économique et affectif public, la détention et la proposition d'expulsion de la famille de Biloela a ramené avec force l'expulsion et la complicité des compagnies aériennes dans l'arène du débat public.
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The campaign featured the faces of baby Tharunicaa and her sister Kopika from Biloela, who at the time, were the only two children left in Australian immigration detention (Sanchayan and Truu 2021)
13 Bien que Qantas ne soit pas la seule compagnie aérienne impliquée dans les mouvements forcés au sein du régime australien de détention et d'expulsion, ce rôle lui a valu d'être au centre de la pression publique et de campagnes. Lors des campagnes très visibles visant à sauver la famille de Biloela de l'expulsion, Qantas a reçu des pétitions publiques comportant des milliers de signatures, des déclarations signées par des personnes diverses et éminentes, et a été confrontée à des manifestations devant ses bureaux. L'icône du kangourou, synonyme de la marque Qantas, a servi de synecdoque de la compagnie aérienne dans les campagnes anti-expulsion. Dans le sillage de campagnes réussies au Royaume-Uni, aux États-Unis et en Europe visant des compagnies aériennes, et d'un mouvement croissant en Australie, le Centre australasien pour la responsabilité des entreprises (Australasian Centre for Corporate Responsibility, ACCR) a fait pression sur les compagnies aériennes australiennes pour qu'elles revoient ou abandonnent leurs contrats avec le ministère de l'Intérieur. En 2018 et 2019, l'ACCR a présenté des résolutions aux actionnaires de Qantas lors de l'Assemblée générale annuelle de la société, demandant à Qantas d'abandonner, ou du moins de revoir, son rôle dans les expulsions. Bien que la proposition ait reçu un plus grand soutien de la part des actionnaires en 2019 que l'année précédente, la compagnie aérienne reste investie dans son rôle dans les expulsions, déclarant qu'il n'appartient pas aux compagnies aériennes de se prononcer sur des décisions complexes en matière d'immigration. Si, dans cette réponse, l'entreprise cherche à échapper à sa responsabilité sociale en s'en remettant au gouvernement et en se repliant sur sa position de simple entreprise, la compagnie aérienne joue un rôle de premier plan tant dans les questions de justice sociale que dans l'imaginaire public
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Protesting against ‘deportations to danger’ outside the Qantas office. Photo: Zebedee Parkes
Peinture murale réalisée par l'artiste Van T Rudd en soutien à la campagne « Stop aux Expulsions vers le Dange r», Melbourne. Photo : Van T Rudd.
VI. ‘Spirit of Australia’: les compagnies aériennes et l'opinion publique
14 Qantas est l'une des marques les plus connues d'Australie. C'est le transporteur national du pays et la plus ancienne compagnie aérienne du monde encore en activité. L'aviation commerciale en Australie est née dans les années 1920 avec la fondation de Qantas dans l'« outback » du Queensland. Les deux fondateurs de la compagnie aérienne étaient des soldats rentrés au pays qui s'étaient rencontrés alors qu'ils servaient dans l'Australian Flying Corps en Palestine pendant la Première Guerre mondiale, ce qui met une fois de plus en évidence les circulations entre l'empire, le militarisme et l'aviation. En effet, le dirigeant fondateur de Qantas a écrit que la compagnie aérienne était « inspirée par l'esprit de l'ANZAC », le corps d'armée australien et néo-zélandais. Malgré sa faible population, l'Australie était très active dans le domaine en développement de l'aviation. L'aviation a rapidement été reconnue comme essentielle au projet de colonisation en cours sur le continent, les avions permettant de mener des reconnaissances aériennes du territoire afin de délimiter et de s'approprier les terres pour les colons, de relier les sites aux extrémités de vastes réseaux ferroviaires inachevés, et d'assurer des échanges beaucoup plus rapides entre les États et avec la Grande-Bretagne grâce à l'introduction du courrier aérien. La puissance aérienne a également permis de fournir des services médicaux aux colons qui se trouvaient aux frontières intérieures et d'étendre la colonie à des ranchs d'élevage et des missions reculés, grâce à la création du Royal Flying Doctor Service en 1928. Dans les années 1920, les vols de Qantas ont également permis d'acheminer du beurre frais, de la glace et du poisson frais aux habitant·es de l'intérieur du pays. Le développement de l'aviation a également été crucial pour l'affirmation de la puissance de l'Australie dans le Pacifique, notamment pendant la Seconde Guerre mondiale. L'aviation revêtait une importance unique en Australie compte tenu de l'éloignement géographique de l'île-continent et du sentiment des colons que l'Australie était un avant-poste de l'empire qui devait rester connecté à la Grande-Bretagne et au reste du monde anglo-saxon.
L'aviation revêtait une importance unique en Australie en raison des distances géographiques.
Alors que la colonie de peuplement continuait à construire une subjectivité « indigène », cela s'est reflété dans l'imagerie commerciale de Qantas. Le logo du kangourou a été lancé en 1944, sur la base du dessin de la pièce australienne d'un penny. Lorsque Qantas s'est associée au britannique Imperial Airways en 1935 pour assurer la liaison entre l'Australie et le Royaume-Uni, la route a été baptisée la "route du kangourou" (Kangaroo Route) et a été réalisée en 31 « sauts », reliant la métropole et la colonie par voie aérienne. Avec son logo emblématique de kangourou stylisé rouge et blanc qui orne la queue de ses avions, Qantas cherche à assumer une position autochtone. Le kangourou, animal originaire de l'île-continent, figure également sur les armoiries du pays pour symboliser la propulsion vers l'avant et l'avancement ; ce marsupial à queue de gouvernail ne peut apparemment pas reculer facilement.
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Les armoiries du Commonwealth d'Australie représentent le kangourou et l'émeu, deux animaux indigènes qui ne peuvent pas reculer facilement.
Le logo emblématique du kangourou a été modifié au fil des ans pour devenir de plus en plus stylisé. Ici, un modèle populaire se trouve sur le tarmac de l'aéroport de Sydney. Image : Edwin Leong.
15 Au cours des deux dernières décennies, le marketing de Qantas s'est concentré sur la campagne publicitaire très connue "Spirit of Australia", peut-être l'une des campagnes ayant le mieux réussi en Australie. La compagnie aérienne a produit au moins cinq versions d'une vidéo reprenant la chanson de Peter Allen de 1980 I still call Australia home. Quatre de ces vidéos, produites en 1998, 2000, 2004 et 2009, ont toutes mis en scène des chœurs d'enfants chantant la chanson dans des paysages panoramiques mondiaux et nationaux. Il a été noté que le moment de la sortie de chaque publicité coïncidait avec des événements nationaux tels que les Jeux olympiques de Sydney (Drew, 2011). Les quatre vidéos exploitent les mythologies nationalistes sur le paysage, le patrimoine, la liberté, l'exploration et l'outback (Drew, 2011). Les publicités édifient une relation particulière à l'aventure, au voyage, au foyer et à l'appartenance. Elles renvoient à des courants de mouvement et d'exploration qui sont à la fois familiers dans le contexte contemporain, et au cœur de l'histoire coloniale australienne (Moreton-Robinson, 2015:4).
Cette campagne iconique qui dure depuis des décennies réaffirme une subjectivité nationale.
Le protagoniste de la chanson est un·e voyageur·e australien·ne qui, bien qu'il·elle soit loin et qu'il·elle ait vu tout ce que le monde a à offrir, réalise que son allégeance émotionnelle est envers l'Australie et qu'il·elle reviendra toujours chez lui·elle (Drew, 2011:324). Visuellement, les enfants représentent cet·te aventurier· en se déplaçant sur des sites mondiaux reconnaissables. Un passage de la chanson célèbre cette mobilité : "Je suis toujours en voyage. J'aime la liberté" (I’m always travelling, I love being free). Qantas démontre qu'elle fournit le service aérien à la fois pour emmener le ou la voyageur·se australien·ne vers ces destinations mondiales et, reconnaissant son aspiration nostalgique, pour que ce soit finalement la marque qui assure le retour émotionnel au foyer. Les enfants tiennent les principaux rôles de chant dans les premières versions de la vidéo sont tou·tes blanc·hes, tandis que les enfants aborigènes sont présenté·es comme faisant partie du paysage ou comme une culture exotique vouée à être rencontrée par les enfants voyageur·ses (blanc·hes). Dans la version de 2009, le couplet d'ouverture est chanté en langue Kala Lagaw Aw par un enfant indigène du détroit de Torres qui fait partie de la chorale, et le retour sentimental des enfants se fait vers le désert rouge du centre de l'Australie (Drew, 2011). La campagne vidéo nationale de 2020 représente consciemment la diversité de l'Australie d'une manière que les vidéos précédentes n'avaient pas montrée. En fin de compte, cette campagne iconique qui dure depuis des décennies réaffirme une subjectivité nationale jeune, mobile, blanche et libre, ayant des liens affectifs profonds avec les vastes paysages australiens.
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I Still Call Australia Home, Quantas TV commercial (1999). La version 1998 de la publicité continue d'accumuler de nouveaux likes et commentaires en 2021, dans le contexte de la fermeture des frontières à cause du COVID, et de nombreux commentateur·rices expriment leur propre nostalgie et leur désir de rentrer "chez eux et elles" en Australie.
Source: https://www.youtube.com/watch?v=hbGuqmaDgLA
I Still Call Australia Home, Qantas TV Commercial, 2009
Source : https://www.youtube.com/watch?v=hbGuqmaDgLA
16 La cinquième version, la reprise de la vidéo en 2020, visait à mobiliser la solidarité autour des confinements COVID, avec les enfants enregistré·es sur des téléphones mobiles qui chantaient depuis chez elles et eux. Qantas, qui cherche à récupérer une partie des milliards qu'elle a perdus pendant la pandémie, a offert aux passager·es fidèles la possibilité de prendre un « vol de plaisance » (joy flight) en octobre 2020. Le vol "Great Southern Land" était un voyage aller-retour de sept heures au départ de Sydney, qui faisait une boucle autour de sites populaires comme Uluru, Kata Juta et la Grande Barrière de Corail pour offrir aux passager·es en manque d'altitude des vues spectaculaires. La publicité pour le vol affirmait : « Depuis le ciel, il n'y a pas de restrictions frontalières. » (Cockburn, 2020) Les billets en classe économique coûtaient 787 dollars et ceux en classe affaires 3 787 dollars, et le vol a affiché complet en moins de dix minutes. Ce vol de plaisance, condamné par les défenseur·es du climat au cours d'une année où de vastes étendues du Great Southern Land ont été détruites par des feux de brousse, a clairement répondu à une attente du public. Le vol était vendu comme une occasion de se remémorer avec nostalgie des jours passés - même si ces jours n'étaient pas si lointains - où les passager·es pouvaient profiter de tous les rituels et des sublimes vues aériennes associés aux voyages en avion. Si le vol a offert à certaines personnes la possibilité de s'élever au-dessus des restrictions frontalières, pour d'autres, la frontière est imposée par les mécanismes du transport aérien.
« Depuis le ciel, il n'y a pas de restrictions frontalières »
Si le marketing et l'image de marque de Qantas occupent une position publique de premier plan, l'autre dimension de la présence de Qantas dans la vie civique est son positionnement progressif en tant qu'entreprise sur les questions sociales. La compagnie aérienne et ses dirigeant·es ont affirmé à plusieurs reprises leur engagement en faveur des droits des LGBTIQ+, des droits des femmes et des droits des Indigènes. La compagnie aérienne a soutenu très activement la légalisation du mariage homosexuel lors d'un débat national controversé et d'un plébiscite public sur la question. Le PDG de Qantas, Alan Joyce, a soutenu ouvertement l'égalité du mariage tout au long de l'année 2017, qui a été légalisé en décembre de la même année. Qantas est également un sponsor du Mardi Gras annuel des gays et lesbiennes de Sydney, et a dévoilé en 2017 une nouvelle livrée arc-en-ciel, utilisant le fuselage d'un avion pour peindre ses valeurs progressistes.
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QANTAS a lancé sa livrée "rainbow roo" pour célébrer son partenariat avec le Mardi Gras de Sidney.
Des militant·es distribuent des tracts devant le stand de Qantas lors du Mardi Gras 2019. Photo : No Pride in Protest.
17 Le parrainage d'entreprise du Mardi Gras de Sydney est cependant contesté, et il y a une mobilisation importante de ceux et celles qui veulent restaurer les racines protestataires du festival et rejeter la collaboration de l'événement avec les entreprises et la police, et qui considèrent la lutte contre le racisme et la police des frontières comme faisant partie de l’action politique queer. Qantas a été ciblé par des groupes militants comme "Pride in Protest" pour son rôle dans les expulsions et le groupe a utilisé le Mardi Gras comme une opportunité pour faire campagne contre le rôle de Qantas dans les renvois forcés. De même, les finalistes du prix "Women of Influence" commandité par Qantas ont utilisé leur plateforme pour demander à Qantas de cesser de participer aux transports contraints, qualifiant Qantas d'« hypocrite » pour avoir célébré le travail des personnes nominées pour le prix tout en expulsant des demandeur·ses d'asile. Qantas a également utilisé le fuselage d'avion comme une toile pour exposer de l'art des Premières nations. Depuis 1994, dans le cadre de sa série "Flying Art", la compagnie aérienne a commandé cinq livrées basées sur des œuvres d'artistes des Premières Nations.
La compagnie aérienne réussit à parfaitement représenter et stimuler les nationalismes libéraux
Qantas a tenté de se dissocier des types de décisions en droit pénal et en gouvernance des migrations qui ont un impact dévastateur sur la vie des gens, sous la forme d'annulations de visas et d'expulsions. Elle a essayé de se retrancher dans son rôle utilitaire de transport en tant que simple compagnie aérienne. Cependant, outre sa complicité évidente dans les déplacements forcés en tant que fournisseur de transport, la compagnie s'est aussi depuis sa fondation activement positionnée dans un lien fortement affectif avec l'opinion publique australienne. Qantas renvoie à l'opinion australienne une image particulière de ce que signifie l'appartenance à ce pays. La compagnie aérienne réussit à parfaitement représenter et stimuler les nationalismes libéraux, en portant des valeurs progressistes autour de certaines questions de justice sociale tout en mobilisant un imaginaire colonial éminemment nationaliste autour du mouvement, du lieu et de l'appartenance.
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Les avions "Nalanji Dreaming" et "Wunala Dreaming" ont été conçus par le cabinet de design Balarinji, détenu par des Aborigènes. Photo : Salle de presse de Qantas.
VII. Compagnies aériennes et capital
18 Alors que Qantas occupe une place affective de premier plan dans l'imaginaire public et est une cible privilégiée des campagnes anti-expulsion, les chiffres publiés par le ministère de l'Intérieur ont montré que le gros des transferts ministériels est effectué par des vols charter. Au cours de l'exercice financier 2018-2019, le ministère a dépensé 400 000 dollars en vols commerciaux avec des compagnies aériennes comme Qantas, et la somme faramineuse de 5,7 millions de dollars australiens en vols charters (Karp 2020b). Lorsque la famille tamoule de quatre demandeur·ses d'asile a été confrontée à une tentative d'expulsion, les soutiens de la famille ont commencé à rechercher des vols pour Colombo, pensant qu'ils pourraient être sur un appareil de Qantas. A la place, ils ont découvert que la famille était transportée par un avion privé appartenant à Skytraders, une compagnie de charters qui a réalisé d'importants bénéfices grâce à ses contrats avec le ministère de l'Intérieur. Skytraders, qui est sous contrat avec le ministère depuis 2010, a signé un contrat pour la période 2018-2021 totalisant près de 79 millions de dollars australiens pour le « transport aérien de passagers ».
Le gouvernement a ainsi promu la cruauté de son propre régime frontalier
Les activités frontalières du gouvernement australien, et en particulier son régime de détention extracôtier, sont notoirement nimbées de secret. L'accès à l'information ainsi qu'aux personnes est rendu incroyablement difficile pour les chercheur·ses, les journalistes et le grand public. Dans cet esprit, Skytraders a cherché à maintenir ses vols vers Nauru et l'île Christmas à l'abri des regards du public en demandant dès 2012 au système de suivi Flightaware de masquer ses vols charter vers ces destinations. La notoriété de l'entreprise s'est toutefois accrue en 2014, lorsque le gouvernement a représenté un avion de la marque Skytraders dans une bande dessinée produite et distribuée pour dissuader les demandeur·ses d'asile afghan·es. L'avion orange et blanc de Skytraders était représenté dans la bande dessinée en train de transférer des demandeur·ses d'asile vers une île isolée. La bande dessinée tentait de représenter fidèlement les horreurs du régime frontalier australien, notamment les interceptions de bateaux, les transferts forcés par avion, la rétention sur des îles éloignées, ainsi que les problèmes médicaux, la dépression et le sentiment de désespoir qu'un·e détenu·e peut éprouver. Le gouvernement a ainsi fait la promotion de la cruauté de son propre régime frontalier comme moyen de dissuasion.
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Le site Web des appels d'offres du gouverment australien montre le contrat de Skytraders pour 2018-2021, qui a été majoré en 2019 d'un montant de 14 805 450 AUD. Image : https://www.tenders.gov.au/Cn/Show/c8efbc0f-00f5-997f-fbef-a2488c4e1271
A 2014 graphic novel produced by the Australian government
Le site internet de Skytraders décrit les services fournis au ministère de l'Intérieur comme "discrets" et offrant une "garantie opérationnelle". Image : Capture d'écran du site https://skytraders.com.au/special-missions/
19 Les services fournis au ministère de l'Intérieur sont qualifiés de « missions spéciales » sur le site internet de Skytraders ; des missions spéciales qui répondent à des « impératifs politiques » en toute discrétion. L'entreprise promet également la garantie opérationnelle la plus élevée avec la « plus petite empreinte ». Bien que cela puisse faire référence à des mesures de durabilité, cela évoque également l'image de marcher furtivement sur la pointe des pieds pour éviter la détection, ou pour éviter d'aborder un sujet controversé.
La projection de la nation dans le ciel
D'autres aspects clés du travail de Skytraders sont la fourniture de services aériens à la Division antarctique australienne (Australian Antarctic Division), reliant Hobart à l'Antarctique, et Skytraders a effectivement été la première compagnie aérienne civile à effectuer des vols vers l'Antarctique. Skytraders est également spécialisée dans les projets de surveillance et de prospection, travaillant avec la branche aérienne de la police de Victoria (Victoria Police Air Wing), surveillant la zone d'exclusion économique de l'Australie, et travaillant avec des compagnies pétrolières et gazières comme Chevron. Skytraders forme également les forces spéciales de la défense australienne, notamment au parachutisme. Dans la section « Défense » de son site internet, Skytraders fait la promotion d'une vidéo montrant les "bérets rouges" des forces de défense australiennes en train de sauter en parachute d'un avion, portant le drapeau australien et émettant des panaches de fumée rouge décorative, avant d'atterrir dans un stade de Sydney pour remettre le ballon d'un match de rugby à XIII organisé le jour de l'ANZAC Day, la journée nationale de commémoration des mort·es à la guerre. Ce spectacle – auquel Skytraders a participé et dont elle a fait la promotion – rappelle le "théâtre aérien" du début du vingtième siècle, très populaire en Grande-Bretagne et en Australie. Le théâtre aérien, en tant que forme populaire de divertissement, utilisait les spectacles aériens pour promouvoir le militarisme, le nationalisme, la modernité et la force technologique ; ce que Peter Adey a appelé « la représentation d'une communauté politique et la projection de la nation dans le ciel ». (Adey, 2010:67 in Holman, 2019).
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Des membres de l'ADF entrainés par Skytraders sautent en parachute lors d'un match de rugby commémoratif pour remettre le ballon à Sydney. Image: Capture d'écran issue de https://skytraders.com.au/defence/
20 Cette actualisation de la communauté politique et de la projection de la nation dans le ciel ne se limite pas aux pratiques théâtrales aériennes telles que les parachutistes émettant des panaches de fumée rouge, mais est présente dans la manière dont l'opinion publique se rapporte à l'aviation, que ce soit dans les publicités pour Qantas ou dans les luttes publiques relatives aux expulsions par voie aérienne. Il y a un fort sentiment de nationalisme inhérent au transporteur national, et des liens sentimentaux persistants à l'expérience vécue du vol - même face aux impacts dévastateurs du changement climatique - comme en témoigne la vente rapide des billets pour les « vols vers nulle part » de Qantas pendant la pandémie, qui comprenaient des voyages aller-retour de 13 heures au-dessus de la glace de l'Antarctique en train de fondre (Escape, 2020). Les transporteurs nationaux comme Qantas s'attachent à produire un panel de liens affinitaires, et à renvoyer à l'opinion publique le reflet d'une nation moderne, mobile et libérale. Liées à l'histoire et au présent militaires, et motivées par des impératifs de rentabilité néolibérale, Qantas et Skytraders jouent un rôle clé dans la définition et la gestion du territoire politique australien. Si cela se fait en partie par le biais de leurs communications et de leurs performances dans les domaines visuel et discursif, un autre aspect plus opérationnel implique d'être en première ligne pour déterminer qui peut voler et qui ne le peut pas, et de mettre en œuvre sur le plan opérationnel, sur ordre de l'Etat, des mobilités, déplacements et évacuations forcés. Le rôle des compagnies aériennes dans la préservation de l'Australie et de ses frontières ne se limite donc pas à leur rôle de simple véhicule ou de moyen de transport efficace. Pour leur rôle de propulsion des expulsions et des déplacements forcés à travers le réseau de détention et de déportation de l'Australie dans l'archipel du Pacifique, les compagnies aériennes australiennes sont à juste titre sur la sellette.
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21 Les compagnies aériennes et les infrastructures aériennes fournissent à l'État australien la capacité matérielle dont il a besoin pour mener à bien les expulsions. Dans son travail sur l'histoire du train de l’expulsion aux États-Unis, Ethan Blue a soutenu que le train de l’expulsion a « mis de l'acier » dans les lois fédérales sur l'immigration qui ont permis à l'État d'expulsion (deportation state) de s'unifier (Blue, 2015 : 176). Dans le contexte américain, affirme-t-il, « le dispositif matériel de l'expulsion constituait une étape essentielle dans la production de l'aliénation, et donc de la citoyenneté » (Blue, 2015 : 176). Dans le contexte de la gouvernance coloniale de peuplement, les questions de citoyenneté et d'aliénation ne peuvent être résolues tant que la colonie persiste, et les activistes, artistes et chercheur·ses Indigènes ont cherché à résister à la souveraineté coloniale australienne à travers des formes d'un accueil plus large aux demandeur·ses d'asile, et par la production d'un art et d'une recherche critiques sur les liens entre le régime frontalier, l'État colonial, et le déplacement et l'incarcération des personnes des Premières Nations. En s'appuyant sur ces liens, cet article a discuté des continuités des technologies spatiales et carcérales, des fictions géographiques et des logiques raciales qui persistent à travers différentes formes de dépossession à l'intérieur et à partir de l'Australie, où l'État a diversement cherché par diverses voies à « démanteler spatialement et légalement » les revendications d'appartenance (Blue, 2015:176). En considérant l'aviation comme une infrastructure de militarisme et de profit, ainsi que comme un site de sens civiques et de nationalismes libéraux, « l'avion d'expulsion » se révèle pris dans un champ de pouvoir plus large (Walters, 2020). L'examen de l'avion d'expulsion dit aussi quelque chose des vastes distances et de la portée de l'État d'expulsion. En retraçant les connexions et les circulations qui forment les expulsions par voie aérienne de la colonie de peuplement, des géographies éloignées, de l'île de Manus à la Palestine en passant par l'Antarctique, deviennent connectées, et des sujets divers, des Samoa au Kurdistan à Palm Island, se retrouvent liés dans une logique de violence, de confinement et de mobilité forcée à terre et en mer.
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Références
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Notes de bas de page
23
1 Entre 1788 et 1868, l'Australie a reçu 160 000 déportés forcés des prisons britanniques (Hughes, 1996 in Grewcock, 2017a:121).
2 Un des premiers textes de loi présentés au Parlement fédéral nouvellement formé en 1901 fut l'Immigration Restriction Act, conçu pour limiter l'immigration non britannique en Australie. Le procureur général Alfred Deakin déclara que cette politique signifiait « l'interdiction de toute immigration de couleur étrangère, et plus encore, elle signifie au plus tôt, par des moyens raisonnables et justes, l'expulsion ou la réduction du nombre d'étrangers actuellement présents parmi nous. Les deux choses vont de pair et sont le complément nécessaire d'une seule politique - la politique visant à garantir une "Australie blanche" ». (National Museum of Australia, 2021)
3 Eddie Synot, avocat de Wamba Wamba, a souligné que le jugement concernait une application très étroite du pouvoir des étrangers et ne pouvait être considéré comme une reconnaissance de la souveraineté autochtone.
4 Les passeports aborigènes ont été utilisés et acceptés pour la première fois par un pays étranger en 1988, lorsqu'une délégation aborigène s'est rendue en Libye pendant l'année du bicentenaire de l'État australien.
5 Uncle Ray était le fondateur et le président de l'Indigenous Social Justice Association, un militant infatigable et un chef wiradjuri. (Perera et Pugliese, 2015).
6 See his 2018 video work ‘The Island’: (NSW Museums and Galleries, 2020).
7 Un demandeur d'asile a décrit avoir été déplacé de force 12 fois au cours de sa détention. (Arvin, 2021)
8 Ces chiffres ont été révélés par l'Australasian Centre for Corporate Responsibility dans le cadre d'une demande d'accès à l'information (FoI).
9 Alison Mountz a suggéré que ces « mobilités étatiques » méritent d'être étudiées. (Mountz, 2011:317)
10 William Walters définit le terme « corridor d'expulsion » comme étant la conjonture dans laquelle « des mesures actives d'ordre juridique, administratif, spatial, policier, etc. sont prises pour donner au parcours [d'expulsion] un certain degré d'isolation et pour s'assurer qu'il traverse des lieux et des territoires de manière à anticiper et à minimiser les interférences » (Walters, 2018:2808).
11 Statistiques de la police de Nouvelle-Zélande, citées dans (McHardy, 2021b:2).
12 Sur la géographie politique des archipels carcéraux, voir Mountz (2015).
13 Stanley (2017), dans (McHardy, 2021b:2).
14 Voir, par ex., les travaux de Shahram Khosravi, Nathalie Peutz et William Walters.
15 La famille de quatre personnes était détenue dans un établissement distinct de celui qui a été rouvert pour les détenu·es dont les visas ont été annulés, sur l'île Christmas.
16 L'année 2018 a connu une vague de mobilisations autour de cette question avec le scandale Windrush au Royaume-Uni, la condamnation des militants anti-déportation de Stansted au Royaume-Uni (voir Brewer, ce volume), l'annonce de Virgin Atlantic de ne plus participer aux déportations forcées, et un appel de la Fédération internationale des ouvriers du transport (ITF) demandant aux compagnies aériennes commerciales de ne plus aider les gouvernements dans les procédures de déportation.
17 La résolution de 2019 a reçu un soutien de près d'un quart des actionnaires, contre 6 % pour la résolution plus ambitieuse de 2018.
18 Les armoiries s'alignent donc sur le thème de l'avancement célébré dans l'hymne national – ‘Advance Australia Fair’.
19 Il est à noter que les "joy flights" étaient un pilier de l'activité de Qantas cent ans plus tôt.
20 Les données de suivi des vols accessibles au public ont été utilisées dans le passé par des passionnés d'aviation pour découvrir des pratiques d'État ultrasecrètes. L'exemple le plus célèbre est sans doute celui des observateurs d'avions qui ont involontairement découvert le programme de renvois extraordinaires de la CIA en remarquant le comportement inhabituel de quatre avions suspects. Voir (Paglen and Thompson, 2006).
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https://www.antiatlas-journal.net/pdf/antiatlas-journal05-smith-les-expulsions-par-voie-aerienne-et-la-colonie-de-peuplement.pdf
Activists leafleting outside the Qantas stall at the 2019 Mardi Gras. Photo: No Pride in Protest.
La campagne mettait en scène les visages du bébé Tharunicaa et de sa sœur Kopika de Biloela, qui étaient à l'époque les deux seul·es enfants encore détenu·es par les services d'immigration australiens (Sanchayan et Truu 2021).
5 Si l'affaire déterminant la possibilité d'expulser deux hommes aborigènes est particulièrement frappante, les luttes relatives au confinement, à la relocalisation forcée et à l'indigénéité font écho à une géographie plus large de la région Australasie-Pacifique. Les expulsions par voie aérienne et les renvois d'Australie sont intrinsèquement liés à la mobilité forcée à travers un archipel d'îles de la région comprenant l'Australie et Aotearoa Nouvelle-Zélande, ainsi que des sites d'examen et de rétention extracôtier sur le territoire australien de l'île Christmas, sur Nauru, ainsi qu'à Port Moresby et sur l'île Manus en Papouasie-Nouvelle-Guinée. Les demandeur·ses d'asile et les personnes en instance d'expulsion au sein du réseau de détention australien sont déplacé·es entre diverses « installations » extracôtières et continentales, notamment des centres de rétention, des hébergements de transit, des logements résidentiels et des lieux de rétention alternatifs (Alternative Places of detention, APODs) tels que des hôtels. Les hôtels sont utilisés comme APODs apparemment bénins par le gouvernement australien depuis au moins 2010, et ont été décrits comme un site de « sanction civile » du fait de leur appropriation de sites et de pratiques civils dans le dispositif carcéral punitif de l'État (Pugliese, 2009:155). Les hôtels en tant que lieux de détention ont attiré l'attention du public en 2019-2020 lorsque, dans le contexte de la pandémie de COVID, des détenu·es ont organisé des manifestations depuis leurs cellules d'hôtel (Burridge, 2020 ; Loughnan, 2020). Les mobilités forcées ou contraintes entre ces différents sites de détention ont un effet punitif, servant à « isoler, punir et désorienter » les détenu·es (Gill 2013), mais aussi à couper leurs réseaux de soutien, les privant de stabilité, et finalement les encourageant à renoncer à leur demande de statut de réfugié et à rentrer « volontairement » (Peterie, 2021).
Mobilité forcée à travers un archipel d'îles de la région
Les demandeur·ses d'asile en détention indéfinie font l'expérience de multiples déplacements forcés entre ces sites, et décrivent la détresse et la douleur d'être transféré·e de force au sein d'un système carcéral comme un "acte de torture en soi". Les mouvements vers et depuis le système de rétention sont importants, avec plus de 8 000 déplacements aériens contraints de personnes, y compris des transferts et des expulsions, entre juillet 2017 et mai 2019. Le pouvoir carcéral de l'État recouvre donc aussi bien la « mobilité punitive » que le confinement (Mountz, 2013). La mobilité forcée a une longue histoire, y compris le transport de bagnards, l'esclavage et le travail forcé, l'expulsion de personnes à des fins d'appropriation de terres et de colonisation, et plus récemment, les systèmes de renvoi et d'extradition (Walters, 2018:2801). Cette multitude de mouvements aériens à l'initiative de l'État attire l'attention sur la mobilité de l'État lui-même - la manière dont ses acteurs, ses infrastructures et ses ressources sont mobilisés dans la gouvernance de la migration. L'expulsion se situe donc dans un réseau de circulation et de contrôle, qui inclut aussi à la fois les mouvements entre les sites de détention et le confinement au sein de ces derniers.
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